Petite quand elle faisait du tricot, ton atelier, c’est sûr ». Le destin de Claudine était tout tracé car sa mère tricotait et sa grand-mère crochetait. Un jour, alors qu’elle n’est pas en âge d’intellectualiser le travail d’une couturière, elle prend un bout de tissu et commence à le travailler. Elle touche, elle ressent, elle comprend. La suite sera d’une logique aussi implacable qu’une réparation de fermeture de manteaux, le péché mignon de Claudine.

Durant son enfance et son adolescence, elle tricote tous les soirs pour ses proches. Ses parents la taquinent gentiment en disant : « Regarde la vieille avec son tricot ». Puis, elle commence à coudre grâce à une machine qu’elle a reçue en cadeau. Ce sont les années 80, et quand elle part en vacances, beaucoup de jeunes de son âge pensent à leur walkman, à leurs jouets, à leur ballon, mais Claudine pense à sa machine, elles se manquent mutuellement. 

Tout naturellement, elle devient couturière et après avoir été salariée pendant des années, elle reprend le Rapid couture de Saint-Avold (57) en 2013. Toutefois, elle a eu du mal à faire sa mue tant elle est introvertie. Elle manque de confiance en elle, elle a toujours l’impression qu’elle ne sait pas forcément faire, ou que les autres font mieux. Les clients la rassurent tout de suite et sont ravis qu’elle ait repris l’atelier. Ils lui font confiance et savent qu’avec Claudine c’est toujours « impeccable ».

En quarante ans, Claudine a bien constaté l’évolution de son métier. En 1984, son activité était dévalorisée : « Pourquoi on irait payer quelque chose que l’on peut faire nous-même ? ». 

Sauf que Claudine se rend vite compte que les gens ne savent pas faire et font beaucoup d’erreurs. Alors, elle ravale sa fierté et fournit un vrai travail de professionnelle. Une décennie plus tard, la société a évolué, les produits sont de moins bonne qualité. Les gens achètent de plus en plus de vêtements, c’est la mode de la fast fashion, on achète, on jette au moindre défaut et on ne fait pas réparer. Claudine résiste et ses clients lui font confiance. Et depuis quelques années, la mode est de recycler ses habits, de leur donner une seconde vie. « Même maintenant, plus la réparation se voit, mieux c’est », se souvient Claudine qui explique qu’il y a 40 ans, il ne fallait absolument pas voir qu’il y avait eu une réparation sur son vêtement.

Tout évolue, y compris Claudine qui est fière du chemin parcouru, aussi bien intérieurement que pour ses clients. « On n’a pas besoin de vérifier », voici l’une des phrases qu’elle entend le plus dans son atelier. Cela vient de ses clients, le plus important pour Claudine.